Qui sont les lauréates et lauréats CNRS Physique des médailles du CNRS 2025 ?

Distinction

Le CNRS dévoile ses médaillés de cristal, de bronze et d'argent 2025. Parmi elles et eux, 12 travaillent dans des sections ou de laboratoires rattachés à CNRS Physique. Découvrez les travaux et parcours de ces femmes et ces hommes qui ont fortement contribué au rayonnement et à l’avancée de la recherche en physique.

Les médaillés d'argent à CNRS Physique en 2025

La médaille d’argent distingue des chercheurs et des chercheuses pour l’originalité, la qualité et l’importance de leurs travaux, reconnus sur le plan national et international.

Manuel Bibes, à l’interface de l’oxytronique

Directeur de recherche CNRS au Laboratoire Albert Fert (CNRS/Thales) à Palaiseau, Manuel Bibes est l’un des pionniers de l’oxytronique, un domaine à la croisée de la physique des matériaux, de la matière condensée et de l’électronique. Il étudie les oxydes, une famille de matériaux capables de combiner plusieurs propriétés physiques, comme le magnétisme, la ferroélectricité ou la supraconductivité. En empilant les types d’oxydes sous forme de couches très fines, Manuel Bibes et son équipe explorent ainsi leurs propriétés, notamment aux interfaces où de nouveaux états électroniques bidimensionnels peuvent apparaître. Ces phénomènes ouvrent la voie à des composants pour la spintronique, plus compacts, plus rapides, et potentiellement moins gourmands en énergie. Manuel Bibes a ainsi attiré l’attention d’Intel pour la mise au point de nouveaux composants logiques à base d’oxydes. Il a cofondé en 2024 la start-up NELLOW, avec l’ambition de transformer les découvertes issues du laboratoire en technologies pour l’électronique de demain et d’après-demain.

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Cécile Cottin-Bizonne et la dynamique insolite de la matière active

Physicienne spécialiste des liquides aux interfaces, Cécile Cottin-Bizonne explore les comportements inattendus que peuvent adopter certains systèmes capables de s’autopropulser. À l’Institut Lumière Matière (ILM, CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1) à Villeurbanne, elle co-dirige une équipe qui s’intéresse notamment à la matière active constituée de plusieurs éléments capables de se déplacer par eux-mêmes, comme des microbilles propulsées par des réactions chimiques, ou de petits disques de camphre glissant à la surface de l’eau. En laboratoire, elle observe comment ces objets, mis ensemble, développent des comportements collectifs étonnants : certains s’agrègent en amas virevoltants, d’autres se frôlent, s’entrechoquent ou se figent au gré de leur déambulation. Pour mieux comprendre ces dynamiques complexes, ses recherches allient dispositifs expérimentaux de haute précision et modélisation. À plus long terme, ces travaux ouvrent la voie à des matériaux capables de s’adapter à leur environnement, avec des applications potentielles par exemple en santé ou en agriculture.

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Raphaël Voituriez, un physicien sur la piste des cellules

Dans les tissus vivants, les cellules bougent, s’organisent, interagissent d’une manière en apparence erratique. Raphaël Voituriez, directeur de recherche CNRS au Laboratoire Jean Perrin (LJP, CNRS/Sorbonne Université), cherche les lois physiques à l’œuvre derrière ces comportements. Spécialiste des processus stochastiques, il conçoit des modèles capables de décrire les trajectoires de cellules immunitaires ou de comprendre les conditions qui favorisent – ou freinent – la migration de cellules cancéreuses. L’objectif est d’élaborer des modèles pour comprendre comment, à partir de règles physiques simples, émergent des comportements collectifs parfois inattendus. Au sein de l’équipe « Dynamique stochastique des systèmes vivants », ce théoricien place le dialogue avec la biologie expérimentale au cœur de sa démarche. Il explore ainsi l’interface entre physique fondamentale et sciences du vivant, où les équations découlent de questions concrètes, venues du comportement des cellules.

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Les médaillés de bronze à CNRS Physique en 2025

La médaille de bronze récompense les premiers travaux consacrant des chercheurs et des chercheuses spécialistes de leur domaine. Cette distinction représente un encouragement du CNRS à poursuivre des recherches bien engagées et déjà fécondes.

Erwan Allys : une médaille de bronze pour son expertise à l'interface entre astrophysique et science des données

Enseignant-chercheur, maître de conférences au Laboratoire de Physique de l'ENS depuis 2022 (LPENS, CNRS / ENS-PSL / Sorbonne Université / Université Paris Cité), Erwan Allys travaille au développement et aux applications, tant astrophysiques que cosmologiques, de nouvelles approches statistiques empruntant à la science des données. Il a notamment été le premier à importer dans le domaine de l’astrophysique en utilisant les « Scattering Transforms » qui permettent de caractériser très efficacement, sans apprentissage préalable, les structures d'images complexes. 

Il a ainsi a ouvert un champ de recherche visant à modéliser et séparer les composantes des observations astrophysiques dans des contextes aussi variés que l’étude du milieu interstellaire ou la recherche des traces de l’univers primordial. Au sein d’une équipe au LPENS, il développe ainsi des outils hybrides à la croisée de la physique, des mathématiques appliquées et de l’IA, pour mieux comprendre les signaux faibles de l’univers primordial et ainsi lever le voile sur les premiers instants du cosmos.

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Ada Altieri, la physique du désordre au chevet des écosystèmes

Spécialiste de physique statistique, Ada Altieri est maîtresse de conférences à l’université Paris Cité, au sein du laboratoire Matière et Systèmes Complexes (MSC, CNRS / Université Paris Cité). Elle utilise des outils théoriques issus de l’étude des systèmes désordonnés — comme les verres de spin, les émulsions ou les colloïdes — pour explorer, entre autres, les dynamiques hors équilibre et les comportements collectifs du vivant. Ces travaux ont ainsi montré que certains écosystèmes modèles peuvent connaître des points de bascule : sous l’effet d’une perturbation ou d’un renforcement des interactions, ils passent d’un régime simple et assez prévisible, marqué par un équilibre unique, à un état caractérisé par la coexistence d’équilibres multiples ou d’attracteurs chaotiques. Une transition comparable à celle qui mène, dans les verres, d’un état fluide à un état amorphe. Elle propose aussi un modèle de croissance « sous-linéaire » qui explique pourquoi une plus grande diversité d’espèces peut renforcer la stabilité écologique — une observation empirique que les modèles classiques ne parvenaient pas à justifier.

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Laura Chaix décrypte les matériaux quantiques

Spécialiste des matériaux quantiques, Laura Chaix explore les états électroniques ou magnétiques à l’œuvre dans des composés complexes, comme les oxydes de cuivre supraconducteurs ou certains oxydes magnétiques. À l'Institut Néel (NEEL, CNRS), à Grenoble, elle réalise des expériences sur grands instruments, synchrotron et sources de neutrons, pour sonder les excitations collectives qui parcourent ces matériaux — vibrations du réseau atomique (phonons), ondes de spin (magnons) — ou encore les ordres électroniques ou magnétiques complexes tels que les ondes de densité de charge des électrons. Ces phénomènes jouent un rôle central dans l’émergence de propriétés quantiques comme la supraconductivité. 
Laura Chaix a ainsi mis en évidence un couplage inhabituel entre une onde de densité de charge et une vibration du réseau dans un oxychlorure de cuivre, un cuprate supraconducteur. Ce couplage inattendu entre charges et structure atomique a permis de révéler l’existence d’un mode collectif encore mal compris. C’est la preuve que les matériaux quantiques sont encore largement des Terrae Incognitae, que Laura Chaix affectionne d’explorer.

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Igor Ferrier-Barbut, au cœur des interactions lumière-matière

Chargé de recherche CNRS au Laboratoire Charles Fabry (LCF, CNRS/Institut d’Optique Graduate School) à Palaiseau, Igor Ferrier-Barbut explore les interactions lumière-matière à l’échelle atomique. Il conçoit des expériences où des atomes froids, piégés un par un dans des « pinces optiques » formées par des faisceaux laser, interagissent collectivement avec la lumière. En structurant ces ensembles atomiques avec une précision extrême, il a mis en évidence des phénomènes quantiques inédits comme la sous-radiance ou la super-radiance, où les atomes se coordonnent pour retarder ou amplifier l’émission lumineuse. Avec son équipe, il cherche ainsi à créer des dispositifs capables de stocker ou de transformer de l’information quantique transportée par la lumière. Mêlant manipulation optique, physique quantique fondamentale et modélisation fine, ses recherches s’inscrivent au cœur des technologies quantiques émergentes. Elles visent à bâtir, atome par atome, de nouvelles interfaces entre la lumière et la matière.

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Guillaume Gines et le codage sur ADN

Guillaume Gines, chargé de recherche au laboratoire GULLIVER (CNRS/ESPCI PARIS – PSL), est expert en nanotechnologies à base d’ADN et en programmation moléculaire. Ce domaine de recherche créé des réseaux de réactions (bio)chimiques capable de traiter de l’information encodée dans les séquences qui composent l’ADN. Outre l’aspect fondamental de ces travaux, le chercheur s’intéresse à l’application des programmes ADN pour le diagnostic moléculaire. Par exemple, les recherches de Guillaume Gines ont permis la quantification des niveaux d’expression de microARN, de courts fragments d’ARN impliqués dans la régulation génétique et biomarqueurs de nombreuses pathologies. Combinés à la microfluidique, ces microARN peuvent être isolées dans des de minuscules gouttes d’eau pour être détectés individuellement grâce à un signal fluorescent. Fort de ces travaux, Guillaume Gines a cofondé en 2021 la société Methys Dx, spécialisée dans la détection multiplexe ultrasensible pour le suivi des cancers grâce à des marqueurs épigénétiques.

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Aurélie Hourlier-Fargette, créatrice de mousses architecturées

À la frontière entre physique, physico-chimie et mécanique, Aurélie Hourlier-Fargette cherche à faire s’autoassembler des bulles de manière inhabituelle, afin de concevoir des matériaux nouveaux à partir de mousses et de fibres. Chargée de recherche au CNRS, elle travaille à l’Institut Charles Sadron (ICS, CNRS), à Strasbourg, où elle imagine des systèmes modèles pour analyser les forces physiques à l’œuvre dans ces milieux complexes. Fascinée par la beauté de ces objets, elle aime accompagner les étudiants dans l’élaboration de nouvelles stratégies de fabrication de mousses polymères issues de la solidification de précurseurs liquides. En collaboration étroite avec théoriciens et ingénieurs, elle cherche à comprendre comment des structures peuvent émerger par autoassemblage et être stabilisées. Ses recherches sur les mousses architecturées ouvrent des perspectives prometteuses pour la mise au point de matériaux aux propriétés structurales et mécaniques inédites, avec de potentielles applications dans le biomédical ou la robotique souple.

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Sham Tlili : comprendre comment le vivant se construit

Chargée de recherche CNRS à l’Institut de Biologie du Développement de Marseille (IBDM, Aix-Marseille Université / CNRS), Sham Tlili travaille à l’interface de la physique et de la biologie du développement, en explorant les lois physiques qui gouvernent la formation des tissus vivants. Elle s’intéresse en particulier aux gastruloïdes, des organoïdes embryonnaires issus de cellules souches de souris, qui reproduisent in vitro les grandes étapes de l’embryogenèse. A l’aide d’outils comme la microscopie 3D, la microfluidique, la modélisation et l’analyse d’image, elle décrypte les mécanismes d’auto-organisation cellulaire qui permettent à ces tissus de construire par eux-mêmes leur forme, leur axe et leur fonction. Pour capter ces dynamiques sans les perturber, elle conçoit des protocoles d’imagerie fondés sur des excitations lumineuses localisées et peu invasives. C’est ainsi qu’elle observe le vivant en construction, afin d’en extraire les lois de la physique à l’œuvre dans ces processus.

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Les médaillés de cristal à CNRS Physique en 2025

La médaille de cristal distingue des femmes et des hommes, personnels d’appui à la recherche, qui par leur créativité, leur maîtrise technique et leur sens de l’innovation, contribuent aux côtés des chercheurs et des chercheuses à l’avancée des savoirs et à l’excellence de la recherche française.

Sandra Bosio, l’ingénierie sur mesure au service de la physique

À l’Institut de physique de Nice (INPHYNI, CNRS / Université Côte d'Azur), Sandra Bosio conçoit des dispositifs qui n’existent nulle part ailleurs. Si son domaine de prédilection est la micromécanique de précision, elle peut tout aussi bien mettre au point un cryostat ultra-compact pour explorer les mémoires quantiques, ou inventer un appareil permettant d’étudier la viscosité de fluides soumis à des sollicitations multidirectionnelles. Tout dépend des demandes des chercheurs, avec qui elle dialogue au quotidien pour transformer une idée expérimentale en un dispositif fonctionnel. 
Son expertise dépasse toutefois les murs de l’INPHYNI. Elle a ainsi contribué au projet d’Hypertélescope du Collège de France / Laboratoire Lagrange (UMR 7293), en concevant des systèmes optomécaniques permettant la recombinaison de deux faisceaux issus d’une source unique en mode interférométrique.
Responsable de l’atelier qu’elle a entièrement repensé, épaulée par deux techniciens, elle supervise la fabrication des pièces, les échanges avec les fournisseurs, jusqu’à la gestion des budgets et du matériel. Un travail de précision, au croisement de la recherche fondamentale et de l’ingénierie appliquée.

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Marc Portail, des semi-conducteurs aux poussières d’astéroïdes

Entre physique des matériaux et cosmochimie, Marc Portail a trouvé un terrain commun inattendu : la cathodoluminescence. Ingénieur de recherche au Centre de recherche sur l’hétéroépitaxie et ses applications (CRHEA, CNRS / Université Côte d’Azur) à Valbonne, Marc Portail a consacré une large part de sa carrière à l’étude des semi-conducteurs utilisés pour l’électronique de puissance, avant de se spécialiser dans les techniques de caractérisation, comme la cathodoluminescence. Cette méthode consiste à exciter un matériau par un faisceau d’électrons puis analyser l’émission lumineuse, qui va révéler sa composition chimique et ses défauts cristallins. Curieux de tester son potentiel au-delà des matériaux synthétiques à fort potentiel technologique, Marc Portail collabore avec des cosmochimistes de l’Observatoire de la Côte d’Azur pour l’appliquer à des grains météoritiques. Cette collaboration l’a conduit à participer à l’analyse d’échantillons issus de l’astéroïde Bennu, rapportés sur Terre par la mission OSIRIS-REx. Une aventure scientifique amenée à se prolonger…

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