Igor Ferrier-BarbutChargé de recherche CNRS au Laboratoire Charles Fabry (LCF)
Igor Ferrier-Barbut, au cœur des interactions lumière-matière
Chargé de recherche CNRS au Laboratoire Charles Fabry (LCF, CNRS/Institut d’Optique Graduate School) à Palaiseau, Igor Ferrier-Barbut explore les interactions lumière-matière à l’échelle atomique. Il conçoit des expériences où des atomes froids, piégés un par un dans des « pinces optiques » formées par des faisceaux laser, interagissent collectivement avec la lumière. En structurant ces ensembles atomiques avec une précision extrême, il a mis en évidence des phénomènes quantiques inédits comme la sous-radiance ou la super-radiance, où les atomes se coordonnent pour retarder ou amplifier l’émission lumineuse. Avec son équipe, il cherche ainsi à créer des dispositifs capables de stocker ou de transformer de l’information quantique transportée par la lumière. Mêlant manipulation optique, physique quantique fondamentale et modélisation fine, ses recherches s’inscrivent au cœur des technologies quantiques émergentes. Elles visent à bâtir, atome par atome, de nouvelles interfaces entre la lumière et la matière.
Lorsqu’un atome absorbe de la lumière, il la réémet — mais que se passe-t-il lorsqu’ils sont des dizaines d’atomes à interagir ? Voilà le genre de questions qui intéresse Igor Ferrier-Barbut, chargé de recherche CNRS au Laboratoire Charles Fabry, à l’Institut d’Optique. Formé à l’université de Grenoble, passé par Berkeley, l’ENS Paris, le Laboratoire Kastler Brossel et l’université de Stuttgart, il conçoit pour y répondre des expériences de physique quantique d’une grande précision.
À l’aide de faisceaux laser focalisés et formant ce que l’on appelle des « pinces optiques », son équipe de recherche piège des atomes un par un dans le vide. « On capture un atome en focalisant un faisceau laser sur un point minuscule : l’atome va s’y positionner, attiré par la lumière », explique-t-il. En les ordonnant ainsi en réseau, il étudie comment ces atomes interagissent collectivement avec la lumière, dans des régimes où les effets quantiques deviennent dominants.
Il s’intéresse à des phénomènes subtils, où l’état électronique — c’est-à-dire le niveau d’énergie des électrons — détermine la manière dont les atomes absorbent, retiennent ou réémettent la lumière. Il a ainsi mis en évidence deux effets opposés : la sous-radiance, où la lumière reste piégée dans le système, et la super-radiance, où elle est réémise de façon amplifiée grâce à des interférences constructives. « Ces effets ne peuvent émerger que si les atomes sont parfaitement contrôlés et placés à des distances bien définies », précise le chercheur.
Il a récemment lancé une nouvelle plateforme expérimentale autour de l’atome de dysprosium, choisi pour ses propriétés électroniques propices à l’interaction lumière-matière. Ce dispositif rend possible le contrôle local de l’interaction et la détection directe des excitations. Il permettra de structurer des réseaux d’atomes individuels à des distances inférieures à la longueur d’onde du laser utilisé.
À terme, ces travaux pourraient contribuer au développement d’interfaces capables de stocker ou de transmettre de l’information quantique, un enjeu central pour des technologies comme les mémoires quantiques ou la communication quantique.
ERC Starting Grant 2021 : Subradiance in atomic arrays / Sous-radiance contrôlée dans un réseau d’atomes ordonnés (CORSAIR)
La description de l'interaction de la lumière avec un ensemble d'émetteurs quantiques présente un intérêt pour la compréhension d'une grande diversité de systèmes, utile pour la nanophotonique, la métrologie et l'informatique quantique. Comprendre et contrôler comment un ensemble d'émetteurs quantiques émet ou absorbe collectivement de la lumière est un défi car il s'agit d'un problème quantique dissipatif dit « à N-corps ».
L'objectif du projet CORSAIR est donc d’explorer une nouvelle voie expérimentale basée sur l’utilisation de réseaux ordonnés d'atomes à deux niveaux pour étudier la sous-radiance, c’est-à-dire la suppression de l'émission spontanée collective. Pour cela, le projet visera à développer de nouveaux protocoles expérimentaux, avec une plateforme capable de contrôler la dissipation collective dans un ensemble d’atomes, par une méthode d’adressage modifiant localement leur interaction avec un champ d’excitation résonant.