Exploiter la composante magnétique de la lumière grâce aux nanotechnologies

Résultat scientifique Nanosciences Optique et métrologie

Des chercheurs ont élaboré une nanostructure capable d’accroître le champ magnétique d’une onde lumineuse, ouvrant la possibilité d’observer l’interaction entre cette composante magnétique de la lumière, et la matière.

La lumière est constituée d’une partie électrique (un champ électrique) et d’une partie magnétique (un champ magnétique). Jusqu’à présent, les scientifiques ont orienté leur recherche uniquement sur l’interaction entre la partie électrique de la lumière et la matière. Cela a donné lieu à de nombreuses applications dans l’imagerie biologique, la cryptographie, le photovoltaïque, mais aussi les écrans, les sources de lumière, etc.

Accéder à l’autre moitié des interactions avec la partie magnétique de la lumière et la matière permettrait de développer des applications jusqu’ici hors de portée. C’est un véritable défi car ces interactions sont très difficiles à observer en raison du très faible couplage entre la partie magnétique de la lumière et la matière. Les champs électriques et magnétiques portent pourtant la même quantité d’énergie. Mais il est communément accepté que le couplage entre le champ électrique optique et la matière est d’au moins quatre ordres de grandeur plus élevé que l’interaction avec le champ magnétique. En collaboration avec des équipes françaises, espagnoles et américaines, des physiciens de l’Institut des nanosciences de Paris (INSP, CNRS/Sorbonne Université) ont créé des objets nanométriques, appelés nano-antennes, afin d’accroître le champ magnétique de la lumière et forcer ainsi ses interactions avec la matière.

En jouant avec la dimension (environ 150 nanomètres) et la forme (cylindrique) de ces nanostructures (figure 1a et 1b), les chercheurs ont démontré expérimentalement et théoriquement que ces nano-antennes permettaient d’augmenter la partie magnétique de la lumière grâce à un phénomène de résonance optique. En particulier, ils ont montré qu’en plaçant la nanostructure à proximité d’une nanosource de lumière, ils pouvaient effectivement augmenter son émission magnétique, les transitions dipolaires magnétiques se trouvant favorisées par rapport aux transitions dipolaires électriques (figure 1a).

Par ailleurs, en contrôlant la position de la nano-antenne photonique par rapport à cet émetteur, grâce à l’utilisation d’un microscope champ proche optique, les chercheurs ont pu observer les distributions de densités d’états locales magnétiques et électriques à proximité. Cela révèle la façon dont elle modifie l’environnement électrique et magnétique autour de la nanosource, (figure 1c et d), et donc la manière dont cette dernière peut effectivement émettre ses photons, selon un « canal électrique » ou « magnétique ».

La manipulation et l’augmentation des interactions entre la lumière magnétique et la matière constituent une étape charnière en nanophotonique et en physique de manière générale. En effet, elles ouvrent de nouvelles possibilités dans des thématiques de recherches aussi variées que l’opto-électronique, l’étude de molécules chirales (à la base de nombreux processus biologiques), l’optique non-linéaire, la spintronique, les métamatériaux ou les processus photochimiques.

Image retirée.
Figure 1. (a) schéma et (b) image au microscope électronique à balayage d’une nano-antenne photonique en silicium possédant une résonance magnétique et couplée à une nanoparticule luminescente (particule violette) possédant des émetteurs dipolaires électriques et magnétiques. (c) et (d), distributions spatiales de l’environnement quantique magnétique et électrique à proximité de la nano-antenne photonique, caractérisées par les densités d’états locales (LDOS) magnétique et électrique.

 

Référence

Enhancing magnetic light emission with all-dielectric optical nanoantennas
M. Sanz-Paz, C. Ernandes, J. Uriel Esparza, G. W. Burr, N. F. van Hulst, A. Maitre, L. Aigouy, T. Gacoin, N. Bonod, M. F. Garcia-Parajo, S. Bidault et M. Mivelle
Nano Lett., 2018, 18 (6), pp 3481–3487
DOI: 10.1021/acs.nanolett.8b00548
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Contact

Mathieu Mivelle
Chercheur CNRS, Institut des nanosciences de Paris
Communication CNRS Physique