Un nouvel état quantique de la matière : le gaz d’excitons superfluide

Résultat scientifique

Des physiciens ont réalisé la première observation d’une condensation de Bose-Einstein d’un gaz d’excitons. Grâce à l’observation de vortex quantiques, l’équipe de recherche a mis en évidence la superfluidité du gaz, caractéristique de la condensation de Bose-Einstein.

Les excitons sont des paires « électron-trou » issues de l’excitation optique d’un semi-conducteur. Composé de deux fermions (spin demi-entier), les excitons ont donc un caractère bosonique (les bosons ont un spin entier). Il est donc en théorie possible de réaliser une condensation de Bose- Einstein à partir d’un gaz d’excitons. Bien que prédite dès les années 60, cette condensation n’avait pourtant jamais été observée clairement.

En étudiant un gaz d’excitons obtenu dans un semi-conducteur, l’arséniure de gallium, et confiné dans un piège électrostatique de 10 micromètres, des chercheurs de l’Institut des nanosciences de Paris (INSP, CNRS/UPMC) ont constaté qu’en dessous d’un degré kelvin, le gaz devient superfluide, une des signatures de la condensation de Bose-Einstein.

La superfluidité a été mise en évidence par la formation de vortex quantiques lors du passage de l’état classique à l’état quantique. Ces vortex apparaissent sous la forme de taches noires facilement reconnaissables dans l’émission optique du gaz d’excitons. Normalement, ils sont très difficiles à observer car en mouvement rapide. Grâce au faible désordre régnant au niveau du potentiel de piégeage électrostatique, ils sont restés en quelque sorte « accrochés ». Pour parvenir à ce résultat, il a fallu un haut niveau de contrôle du gaz d’excitons et de son environnement, obtenu notamment grâce à un confinement quasi modèle.

Dans ces expériences, il est à noter que l’émission optique du gaz d’excitons diminue lors du refroidissement menant à la condensation. Cette observation vient ainsi confirmer les travaux théoriques de Combescot et al. de 2007 qui avait prédit qu’un condensat d’excitons devait être majoritairement inactif optiquement, puisque les états d’excitons dits noirs (ils ne peuvent pas émettre de photons) occupent toujours l’énergie la plus basse, seule configuration où la condensation de Bose-Einstein est permise.

Grâce au protocole expérimental mis en place, il devient possible d’étudier plus en avant les phases quantiques accessibles aux gaz d’excitons. Après l’hélium superfluide, les condensats atomiques ou les supraconducteurs, c’est donc une nouvelle gamme d’états quantiques de la matière, issue cette fois des semi-conducteurs, qui s’offre à nous.

Image retirée.

Profil spatial de l’émission lumineuse d’un gaz d’excitons confiné dans un piège électrostatique de 10 μm d’extension spatiale, à une température de 330 mK. Au centre de l’image, on distingue une tâche noire signalant une singularité locale de la densité d’excitons piégés, c’est-à-dire un vortex quantique piégé par le faible désordre électrostatique du potentiel de confinement. D’autres vortex sont visibles en périphérie du nuage d’excitons sur cette image.

 

En savoir plus

Quantized Vortices and Four-Component Superfluidity of Semiconductor Excitons 
R. Anankine, M. Beian, S. Dang, M. Alloing, E. Cambril, K. Merghem, C. Gomez Carbonell, A. Lemaître and F. Dubin 
Physical Review Letters (2017), doi:10.1103/PhysRevLett.118.127402 
Lire l’article sur la base d’archives ouvertes ArXiv

 

Informations complémentaires

Institut des nanosciences de Paris (INSP, CNRS/UPMC)

Contact

François Dubin
Chargé de recherche CNRS, Institut des nanosciences de Paris
Jean-Michel Courty
Chargé de mission institut
Marine Charlet-Lambert
Chargée de communication