Mesure optomécanique d’un nanorésonateur vibrant dans un liquide

Résultat scientifique

Des physiciens ont conçu le premier nanodispositif optomécanique ultrasensible fonctionnant dans un liquide. Ce dispositif leur a permis d’étudier l’interaction liquide/surface dans le régime de vibrations à très haute fréquence.

Les techniques de micro et nanofabrication permettent aujourd’hui de réaliser des capteurs mécaniques miniatures fonctionnant en milieu liquide, notamment pour des applications en biologie. La sensibilité de ces capteurs est toutefois bien inférieure à ce que permettent les systèmes hybrides combinant nano-optique et nanomécanique. Ces nouveaux systèmes ont la sensibilité suffisante pour mesurer les infimes vibrations mécaniques dues aux fluctuations quantiques. Toutefois, conçus pour fonctionner à l’air libre ou dans des cryostats, ils sont bien souvent inutilisables en milieu liquide. Des physiciens du laboratoire MPQ (Univ. Paris Diderot/CNRS) viennent de mettre au point un dispositif hybride optomécanique adapté au milieu liquide, dont la sensibilité est comparable à celle des meilleurs dispositifs fonctionnant à l’air libre. Ils l’ont utilisé pour étudier l’interaction entre un fluide et un objet vibrant dans la gamme de fréquences du gigahertz. Ce travail est publié dans la revue Nature Nanotechnology.

Pourquoi certains dispositifs performants à l’air libre deviennent-ils inopérants lorsqu’ils sont plongés dans un liquide ? Parce que les caractéristiques optiques d’un système dépendent de la différence d’indice optique qui existe entre ses composants et le milieu ambiant. Cette différence est importante entre l’air et le verre, mais faible entre l’eau et le verre. En conséquence, les fibres optiques de verre guident la lumière à l’air libre mais la laissent s’échapper dans l’eau. Pour contourner cette difficulté, les chercheurs ont eu l’idée de réaliser leur dispositif dans un autre matériau que le verre, de l’Arséniure de Gallium, parfaitement transparent pour la lumière infrarouge dans les longueurs d’onde micrométriques, et doté d’un indice optique très élevé (n=3,4), bien supérieur à ceux de l’eau ou du verre, tous deux inférieurs à 2. En utilisant les techniques de nanofabrication et de l’optique intégrée, ils ont réalisé un dispositif sur puce consistant en un nanodisque, faisant œuvre à la fois de résonateur mécanique et de résonateur optique, et un guide d’onde conduisant la lumière jusqu’au nanodisque. Ils ont alors utilisé ce dispositif dans de l’eau et dans trois liquides perfluorés. Le couplage entre la lumière circulant dans le disque et le mouvement mécanique de respiration radial de ce dernier leur a permis de mesurer des vibrations avec une résolution de 10-17m/√Hz, soit un gain de plusieurs ordres de grandeur en sensibilité par rapport aux techniques généralement utilisées pour les capteurs nanomécaniques en milieu liquide. En mesurant l’amplitude de ces vibrations et le déplacement et l’élargissement des résonances mécaniques dues au couplage avec le liquide, les chercheurs ont alors pu valider expérimentalement de nouveaux modèles pour décrire l’interaction du mouvement haute fréquence du disque avec son environnement liquide. Les disques nano-optomécaniques sont ainsi capables de surpasser les technologies existantes, en sensibilité comme en bande passante, par exemple pour détecter des changements rhéologiques en milieu liquide.

Image retirée.
Représentation artistique d’un disque nano-optomécanique en interaction avec un liquide. Le résonateur en disque est accompagné de son guide de couplage optique, suspendu linéairement dans son champ optique évanescent.
© C. Baker et I. Favero/CNRS-Université Paris Diderot
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High frequency nano-optomechanical disk resonators in liquids 
E. Gil-Santos1, C. Baker1, D. T. Nguyen1, W. Hease1, A. Lemaître2, S. Ducci1, G. Leo1 et I. Favero1Nature Nanotechnology (2015)

 

Informations complémentaires

1 Matériaux et Phénomènes Quantiques (MPQ) 
2 Laboratoire de Photonique et Nanostructures (LPN)

Contact

Communication CNRS Physique