Encapsuler des médicaments pour réduire leur cardiotoxicité

Résultat scientifique

Une équipe internationale a développé une nouvelle nano-plateforme à base de dendrimères auto-assemblés pour la délivrance de médicaments dans le but de limiter la cardiotoxicité liée au canal hERG et d'améliorer l’efficacité des traitements.

Références :

La cardiotoxicité, en particulier celle liée au canal hERG, est une cause majeure d’échec des médicaments. Elle est à l’origine du retrait du marché de plusieurs médicaments et de l’échec de nombreuses molécules durant la phase de développement. Réduire la liaison des composés thérapeutiques au canal hERG est alors un enjeu crucial dans le développement des médicaments. Les nanotechnologies pour l’administration de médicaments ont largement été explorées afin de réduire la toxicité systémique et d’améliorer l’efficacité thérapeutique.  Cependant, peu d’études sur ces stratégies ciblent spécifiquement la cardiotoxicité liée à hERG.

Une équipe internationale impliquant trois laboratoires CNRS a conçu et développé une nano-plateforme pouvant encapsuler des médicaments pour limiter leur cardiotoxicité. Cette plateforme, déjà étudiée pour produire des agents de contraste pour l’imagerie biomédicale et des nanovecteurs fluorés pour imager et traiter simultanément des tumeurs cancéreuses, est basée sur des dendrimères amphiphiles. Les dendrimères sont des molécules dont la structure qui est bien précise part d’un cœur central vers sa périphérie par des ramifications, telles un arbre. La plateforme exploite l’architecture moléculaire précise, la coopérativité multivalente et le comportement d’auto-assemblage de ces nano-systèmes. Les dendrimères ainsi auto-assemblés en nanomicelles (agrégat sphéroïdal de molécules amphiphiles) ont des propriétés adaptables, une taille uniforme et une capacité de charge des médicaments élevée. Des molécules peuvent être encapsulées au cœur de ces nanosystèmes pour les administrer efficacement tout en limitant leur liaison au canal hERG.

Ces recherches ont été menées dans les laboratoires CNRS suivants :

  • Centre Interdisciplinaire de Nanoscience de Marseille (CINaM, CNRS/Aix-Marseille Université)
  • Centre de Recherche en Cancérologie de Marseille, (CRCM, CNRS/Institut Paoli-Calmettes/Aix-Marseille Université)
  • Centre de Résonance Magnétique Biologique et Médicale (CRMBM, Aix Marseille University/CNRS)

Afin de valider cette stratégie, trois molécules connues pour leur liaison au canal hERG ont été testées :  la chloroquine (CQ) utilisée dans le traitement du paludisme (malaria), la doxorubicine (DOX) un médicament anti-cancéreux, et enfin un inhibiteur de la protéine nucléaire 1, ZZW115, une molécule émergeante aux propriétés anti-cancéreuses. Les dendrimères auto-assemblés ont permis l’encapsulation efficace de ces trois molécules, malgré leurs structures et propriétés très différentes, confirmant ainsi leur large applicabilité et leur polyvalence pour la délivrance de médicaments. De façon remarquable, ces nanoformulations ont réduit significativement l’affinité de liaison des trois molécules pour le canal hERG. Ces résultats indiquent une nette réduction du risque cardiaque potentiel.

Figure : Formulations de nanodendrimères auto-assemblés permettant de diminuer la liaison à hERG. Schéma d’un nanosystème de dendrimères auto-assemblés permettant de réduire la liaison du médicament au canal hERG et d’éviter ainsi la cardiotoxicité liée à hERG.
Figure : Formulations de nanodendrimères auto-assemblés permettant de diminuer la liaison à hERG. Schéma d’un nanosystème de dendrimères auto-assemblés permettant de réduire la liaison du médicament au canal hERG et d’éviter ainsi la cardiotoxicité liée à hERG.

Au-delà d’une cardiotoxicité réduite, ces nanomédicaments ont montré des propriétés pharmaceutiques très favorables, comme une taille de particule petite et uniforme, un temps de circulation sanguine prolongé permettant un ciblage efficace des foyers de maladie dans l’organisme. L’imagerie in vivo a confirmé une accumulation accrue du traitement antipaludique dans le foie, et dans les tumeurs pour les anticancéreux. Les études sur les animaux ont confirmé la réduction de la toxicité ainsi que l’amélioration de l’efficacité avec notamment une augmentation de la survie dans le modèle de malaria et une réduction de la croissance tumorale dans des modèles de cancers pancréatiques.

Ces travaux représentent une étape importante dans l’amélioration de l’administration de médicaments, démontrant que les nano-plateformes à base de dendrimères auto-assemblés peuvent réduire efficacement la cardiotoxicité liée à hERG tout en améliorant les effets thérapeutiques dans diverses classes de médicaments et modèles de maladies. Non seulement, ces nano-plateformes se comportent comme des systèmes d’administration efficaces, mais aussi comme des boucliers moléculaires minimisant le risque cardiaque, sans nécessité de modifier chimiquement les candidats médicaments. Cette approche innovante est porteuse d’un potentiel de relance de composés prometteurs dont le développement avait été interrompu en raison de problèmes de cardiotoxicité, et d’accélération de leur transfert vers la clinique.

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Contact

Ling Peng
Directrice de recherche CNRS au Centre Interdisciplinaire de Nanoscience de Marseille (CINaM)
Angèle Viola
Directrice de recherche CNRS au Centre de résonance magnétique biologique et médicale (CNRS/Aix Marseille Université)
Communication CNRS Physique